Le thé produit à Madagascar – dans l’unique pôle de production de l’île – est un thé de caractère, très corsé avec une astringence marquée. Rien d’étonnant à cela puisque c’est un thé produit selon la méthode dite CTC, autrement dit un thé destiné à des mélanges et recherché par les industriels pour son caractère particulier.
Pour se rendre à Sahambavy – le champ des femmes en malgache – il faut emprunter la fameuse RN7 qui descend au sud de l’île en dévoilant au gré des kilomètres de somptueux paysage de brousse. Départ de Tananarive direction Fianarantsoa puis au bout de 400 Km, tournez à gauche en suivant un sentier en terre sur 20 Km.
La route est dans un état chaotique, elle n’est plus entretenue depuis belle lurette. Incroyable de voir les camions, chargés à bloc de thé, emprunter cette trace. Et pourtant, ils y arrivent grâce à la maestria des chauffeurs.
Au bout de 3/4 d’heure on arrive d’un coup d’un seul au milieu des champs de thé. On passe d’un paysage de brousse à des vallées verdoyantes qui ondulent au gré du vent, c’est vraiment magique. Encore quelques kilomètre et nous voilà à l’entrée de l’usine. Le gardien nous laisse passer.
Le cadre est charmant. Face à l’usine, un joli petit lac, un hôtel assez classe (le lac Hotel avec ses chambres sur pilotis, très pittoresque). le sol est sablonneux par endroits, on distingue au loin une pinède. On se croirait un peu dans le sud-ouest de la France du côté des Landes… à part bien sûr ces centaines d’hectares de thé d’un vert lumineux.
Un guide vient à notre rencontre pour nous faire faire le tour des installations. L’usine n’est pas très grande, la taille d’un gymnase, mais bien entretenue, le matériel est propre, les espaces ne sont pas encombrés.
Le guide nous explique rapidement l’histoire du théicole de Sahambavy.
En 1970, que les premiers essais de transplantation de boutures originaires du Kenya s’avèrent un succès. En 1978 l’usine est construite par l’Etat. EN 1996, privatisation et gestion par la société SIDEXAM.
L’exploitation compte près de 335 hectares de plantations dont 94 hectares sgérés par les paysans eux-mêmes. La production journalière est en moyenne de 20 tonnes de feuilles humides, toutes ramassées à la main, par environ 250 personnes.
Voyons ensemble les différentes étapes de transformation du thé.
1- Cueillette
Au moment de notre visite, les cueilleuses ne travaillaient pas. Néanmoins, un jeune garçon, fils d’une cueilleuse vient à notre rencontre et nous explique le travail de sa maman. Le salaire d’une cueilleuse de thé est 60 Ar le kilo. La productivité allant de 50 Kg à 100 Kg par jour, les cueilleuses gagnent un maximum de 6000 Ar soit a peu près 2 euros par jour.
Un ami malgache inspecteur du travail m’expliquera plus tard que le travail des enfants est bien sûr prohibé à Madagascar. Sahambavy a d’ailleurs été un pôle d’initiative dans ce domaine pour tester quelques solutions préventives. Une école a été construite pour accueillir les enfants des employés. Des contrôles réguliers ont été mis en place. Reste que encore aujourd’hui, il est difficile d’empêcher les enfants d’aider leurs parents après l’école, mais ce n’est plus du travail forcé au sens strict. Les traditions ancestrales sont tout de même difficile à faire changer.
2- Flétrissage
Une fois ramassées, les feuilles sont étalées sur de grands séchoirs horizontaux et perdront près de 30% de leur eau par aération ventilée au dessus et en dessous des feuilles. Il faut au final 5 Kg de thé pour produire un Kg de thé.
3- Broyage / roulage
Au terme du flétrissage, les feuilles sont broyés en un pâte épaisse par un procédé automatique.
4- Fermentation (oxydation)
Puis un tapis roulant qui avance lentement, au rythme d’une dizaines de mètre par heure laisse le temps à cette pâte de s’oxyder lentement. Comptez une heure de fermentation. L’ odeur entêtante qui se dégage du thé à cette étape embaume toute l’usine. C’est cette odeur, en moins puissante, que l’on retrouvera ensuite dans l’infusion.
5- Séchage / torréfaction
Pour interrompre la fermentation (oxydation), les feuilles ensuite sont brassées dans un four à 120°C pendant 15 minutes.
5- Filtrage puis emballage
Enfin, le thé est nettoyé de ses impuretés – notamment des bouts de tiges de théiers – au moyen d’une très belle machine de bois et de métal. Ce défibrage est opéré avec un Extracteur Electrostatique le processus est géré de bout en bout par la machine. Elle est équipée de 3 jeux de rouleaux conducteurs d’électricité qui “aimantent” les tiges car ces dernières sont plus chargées en humidité. le distance entre le rouleau et le tapis peut-être modifiée selon le type de thé traité pour un contrôle en finesse du processus. Le thé nettoyé des tiges amère tombe ensuite dans un sac prêt à être expédié. Cette machine a une capacité de traitement de 200 à 600 Kg de thé par heure.
Le thé obtenu est trié au moyen de grands tamis mécanisés. On obtient plusieurs grades : Dust, Pekoe dust, Pekoe fannings, Broken Pekoe.
Le thé est ensuite emballé et expédié. Les malgaches n’étant pas de gros buveurs de thé, 80% de la production est exportée.
Bien sûr, en fin de visite, nous avons droit à une dégustation du thé de Sahambavy. La liqueur est belle, très onctueuse,d’une couleur ocre prononcée. Le nez et le goût correspondent aux senteurs qui saturent l’atmosphère : astringence prononcée, acidité aïgue. C’est un thé costaud, plutôt à l’anglaise. Un nuage de lait et un peu de sucre ne seraient pas de trop. Le thé à la vanille de Madagascar produit ici aussi est plus équilibré et plus doux.
J’ai rassemblé d’autres clichés du voyage dans le diaporama ci-dessous :
et j’ai réalisé quelques vidéos également :