J’ai toujours eu un faible pour l’Iran, son histoire, sa richesse culturelle, le génie de ses habitants… Hélas la dernière révolution a rendu le pays difficile à explorer pour le moment. J’espère pouvoir la visiter un jour futur. D’ici là, je suis heureux de partager avec vous cet article sur la culture du thé en Iran.
Une brève histoire du thé en Iran
L’histoire du thé en Iran débute à la fin du 15ème siècle. Avant cela, c’est le café qui avait la cote. L’Iran étant situé sur la Route de Soie, et peu éloigné de la Chine, il lui était plus facile de se procurer du thé. C’est principalement pour cette raison qu’il est devenu rapidement bien plus populaire en Iran.
En 1899, le Prince Mohammad Mirza, connu également sous le nom de “Kashef Al Saltaneh”, né à Lahijan “importe” du thé indien et commence sa culture dans la région – aujourd’hui la plus réputée pour son savoir faire théicole – celle de Gilan au sud de la mer Caspienne.
Kashef, qui fut le premier maire de Téhéran et ambassadeur iranien en Inde, savait que les anglais ne lui permettraient pas de découvrir les secrets de la culture du thé, leur plus gros business en Inde à cette époque. Parlant français couramment, le prince se fit passer pour un travailleur français pour visiter les champs et les usines afin d’en percer les secrets. Son objectif final était de subtiliser des plans de thé pour les introduire en Iran. Une opération couronnée de succès grâce à sa valise diplomatique qui empêche les anglais de le fouiller à la frontière. Le mausolée de Kashef à Lahijan fait désormais partie du Musée National du Thé Iranien.
Le thé dans l’Iran moderne du 20ème siècle
La première usine de thé moderne fut construite en 1934. De nos jours, on dénombre 32.000 hectares de champs de thé plus ou moins cultivés.
La plupart des fermes sont situées à flan de montagne, sur le modèle de Darjeeling en Inde ou du Sri Lanka. Ces unités produisent un thé noir orthodoxe. La couleur du thé iranien est rouge avec un goût léger. La production totale de thé noir étaient approximativement de 60.000 tonnes en 2009.
Une économie théicole en ruine
Bien que les iraniens soient parmi les plus gros consommateurs de thé au monde (5ème position selon la FAO), l’économie du thé y est en ruine. Les plantations de thé sont à l’abandon ou vendues au plus offrant pour des opération de promotion immobilière. 40% des 500.000 cultivateurs de thé de la région de Gilan ont dû changer de travail pour survivre. Sur les 150 usines de thé de la région de Gilan, seules 30 fonctionnaient en 2004.
Pourquoi une telle débâcle ? Bien sûr en raison du blocus imposé au pays qui a pour effet de renchérir le coût des matières premières et qui favorise le marché noir. La contrebande est le problème numéro 1 en Iran. Selon les chiffres officiels du gouvernement, 75.000 tonnes de thé entrent illégalement dans le pays chaque année. Tragiquement, parmi cette contrebande figure du thé iranien de médiocre qualité, acheté en gros volume, transporté à l’étranger où il est aromatisé de façon artificielle, packagé comme un produit étranger (souvent anglais) puis réintroduit en Iran en contrebande avec de gros profits à la clef.
Le manque de liquidités de l’Iran en Dollars, monnaie d’échange internationale, a aussi des répercutions sur d’autres pays producteurs de thé. Notamment le Sri Lanka, fournisseur historique de l’Iran. Ainsi, le thé du Sri Lanka importé en Iran a vu ses prix baisser de façon importante. Selon le négociant en thé John Keells Ltd, le prix moyen a baissé de 3,5 dollars en septembre 2012 à 3,20 dollars en octobre 2012, soit une baisse de 30 centimes en l’espace de 15 jours. Les producteurs sri lankais cherchent donc de nouveaux débouchés pour leur thé, notamment la demande interne, mais ceci est un autre sujet.
Selon le responsable Tea Exporter Association Niraj de Mel, l’Iran achète 10% de la production de thé du Sri Lanka, soit l’équivalent de +/- 11 millions de kilos. Cette situation a poussé le Sri Lanka à envoyer une délégation en Iran pour négocier un échange direct de thé contre du pétrole.
Les opposants au régime iranien expliquent que l’Etat iranien aurait spolié les producteurs iraniens de leurs stocks de thé pour les revendre à l’étranger afin de s’assurer une substantielle rentrée d’argent et de devises tandis que dans le même temps la demande nationale était assouvie via l’importation de thés sri lankais de qualité médiocres taxés à plus de 30%. Une pierre 2 coups en somme. Difficile de savoir la réalité des faits.
Les derniers chiffres de la FAO, qui datent de début 2012 font état d’exportations en hausse de 112% sur un an à 263.000 tonnes. Des chiffres un peu fantaisistes car difficiles à contrôler dans un contexte politique tendu.
— sources —
Guardian – http://www.guardian.co.uk/world/2005/jun/16/iran.roberttait